Cycles de la Vie

Naissance

 Attendue avec une grande joie par toute la famille, la naissance d’un enfant suscite aussi de nombreuses anxiétés. L’entourage et la famille pratiquent plusieurs rituels pour protéger la mère et l’enfant du mauvais oeil. Le nouveau-né est accueilli au sein de la communauté juive et reçoit son prénom au cours d’une cérémonie religieuse, différente selon le sexe: le Zeved Habat pour la nomination des filles, la Brit Mila pour les garçons.

Avant la Brit Mila

Entre la naissance du garçon et sa circoncision, la mère est confinée à sa chambre. La cérémonie du Hdid (fer en arabe) est un rituel de protection répandu dans le monde juif méditerranéen, mi-magique mi-religieux. Le père ou un Cohen, muni d’une épée, frappe les murs et les portes pour chasser Lilith la démone, qui tue les enfants et met en danger les femmes enceintes. Il prononce des formules Cabbalistiques et la bénédiction des Cohanim : Que l’éternel te bénisse et te protège.

Le troisième jour après la naissance, les femmes participent à une fête (Et-Khamés). Tous les soirs, des repas accompagnés de chants, de récits et de contes célèbrent la naissance. La sage-femme place des Khemsa sur les murs comme protection contre le mauvais oeil.

A la fin de la fête, des dons sont faits à la sage-femme et à son assistante. Lors de la circoncision, la mère est séparée du reste des invités par un grand voile sur lequel des talismans (où sont inscrits des passages de la Bible, des psaumes etc…) sont disposés pour écarter les mauvais esprits ou djnouns.

Naissance du nouveau-né
Naissance du nouveau-né
Textes avec symboles protecteurs des nouveaux-nés.
Textes avec symboles protecteurs des nouveaux-nés.
Un poignard servant à chasser les esprits
Un poignard servant à chasser les esprits

La brit mila ou Alliance par la circoncision doit être pratiquée, selon le commandement biblique, par le père du nouveau-né sur son enfant, âgé de huit jours. L’ablation du prépuce sert de signe d’alliance avec D. pour intégrer le nouveau-né à la communauté juive.

   Le Chabbat précédant la brit mila, le père du nouveau-né, ou plus fréquemment un Mohel (un circonciseur) est appelé à lire la Torah. Des célébrations rassemblent voisins et amis autour d’un festin et la lecture des Psaumes et du Zohar.

La veille, les amies de l’accouchée viennent dormir avec elle pour la protéger et l’aider à se préparer à la cérémonie du lendemain. Un coiffeur est convié à couper les cheveux des hommes et du bébé.

La veille de la circoncision

   A la veille de la circoncision, dans la chambre (ou la synagogue) décorée, on installe sur une table deux Couvre-Torah, deux chandeliers avec des bougies et des parfums pour la bénédiction du vin (Kiddouch).

   On lit un texte, le Eliahou Hanavi (la nuit du prophète Elie), prophète sous la tutelle symbolique duquel la circoncision a lieu. Puni, selon la tradition biblique, pour avoir remis en cause la fidélité d’Israël à l’Alliance, il fut enjoint d’assister aux circoncisions.

Le jour de la circoncision

La circoncision a lieu à la maison ou à la synagogue, en présence d’un Minian (dix hommes). Entouré par la famille et la communauté, le mohel ou circonciseur, prononce les bénédictions d’usage sur le vin, qu’il fait aussi goûter au nouveau-né. 

Kisse Eliahou

Le parrain (Sandak ou Padrino), assis sur une chaise surélevée souvent décorée, le Kissé Eliahou, présente alors le nourrisson au Mohel. Celui-ci procède à l’ablation du prépuce, à la succion du sang du sacrifice et à l’aspersion de l’organe avec de l’eau-de- vie.

Aujourd’hui, de nombreuses familles choisissent d’effectuer la circoncision de leurs enfants dans des hôpitaux ou par des médecins.

Circoncision à Meknès - 1960 (Photo CCJM)
Circoncision à Meknès - 1960 (Photo CCJM)
Circoncision à Casablanca - 1960 (Photo CCJM)
Circoncision à Casablanca - 1960 (Photo CCJM)

La nomination de l’enfant

Le nom de l’enfant, jusque là gardé secret, pour le protéger de l’ange de la mort, est annoncé officiellement et accueilli par des Zgharit (youyous). Les Juifs de la zone espagnole donnent fréquemment le nom du grand-père vivant au petit-fils, les autres préférant celui du grand-père décédé; mais cette règle n’est pas toujours appliquée.

La cérémonie s’achève par un repas ou un buffet – petit déjeuner copieux à base de laitages et de poissons, symbole de fécondité – et se termine par des fruits secs et gâteaux aux miel.

Des Piyoutim sont chantés comme “Eerokh Shir Tehila” du poète David Hassin.

Peinture de Moshe Gabbay représentant la cérémonie du "Pidion Haben"
Peinture de Moshe Gabbay représentant la cérémonie du "Pidion Haben"

Le rachat du premier-né (pidion haben)

   Un commandement biblique enjoint les parents qui ne sont pas des Cohen de racheter les premiers-nés au cours d’une cérémonie qui a lieu la trente et unième nuit après la naissance. Un Cohen récite des bénédictions et reçoit du père une somme d’argent, des bijoux ou des pierres précieuses qui symbolisent le rachat de son enfant.

   Un repas accompagne cette cérémonie, qui marque l’appartenance du nouveau-né à sa communauté. Quelques jours plus tard les sommes ou objets sont retournés aux parents.

 Zeved habat

   La nomination d’une fille (Zeved Habat) donne lieu à une cérémonie qui a lieu, soit à la synagogue le dernier Chabbat du mois suivant la naissance, soit au domicile familial.

   Le rabbin prend l’enfant dans ses bras, cite les noms des femmes exceptionnelles de l’histoire d’Israël, dit les bénédictions et donne le nom de la fillette, qui provoque des Zgharit (youyous) de l’assistance. Un repas complète la cérémonie.

Bar Mitsva

 La Bar Mitsvah est l’événement majeur de la vie des garçons. Entre 10 ans et 13 ans, l’enfant est considéré comme assez mûr pour assumer la pratique religieuse, et son passage à la vie adulte est consacré par son entrée dans le Minian. Cet évènement est soigneusement préparé par un maître qui enseigne au garçon les préceptes d’usage. La veille de la cérémonie à la synagogue, on pratique la coupe de cheveux rituelle (Thfif), dans certaines communautés, en présence de la famille et des amis.

A la synagogue, lundi ou jeudi, le garçon revêt le Tallit et les Tephillim et monte à la Torah.

Il monte ensuite à la Torah . Samedi après-midi ou dimanche soir, il prononce le discours préparé en hébreu (Drach) qui démontre sa maîtrise des arcanes de la loi. Dans plusieurs communautés, cette tradition a été remplacée par la lecture d’une partie de la Paracha de la semaine ( section du texte biblique) et de la Haftarah ( section des livres de prophètes) qui clôturent la lecture de la Torah.

Bar Mitsva lisant la Thora
Bar Mitsva lisant la Thora
Bar Mitsva à Tanger (Photo CCJM)
Bar Mitsva à Tanger (Photo CCJM)
Bar Mitsva Collective à Meknès - 1952 (Photo AIU)
Bar Mitsva Collective à Meknès - 1952 (Photo AIU)

Cet évènement est soigneusement préparé par un maître qui enseigne à l’adolescent les bénédictions, la lecture de la Torah, l’usage du Talit (châle de prières) et des Tephillim (phylactères).

   Dans plusieurs communautés, cette tradition a été remplacée par la lecture d’une partie de la de la semaine (section du texte biblique) et de la Haftarah (section des livres des prophètes) qui clôt la lecture de la Torah.

  Il est ensuite reconduit à son domicile, porté sur une chaise, accompagné de musiciens, sous une pluie de dragées et de bonbons (symbolisant la douceur de la Torah). Ces traditions sont plus ou moins en vigueur aujourd’hui.

  Les jeunes filles, quant à elles, n’ont pas de fête pour marquer leur accession à la majorité. Certaines communautés, en France ou au Canada ont introduit la célébration de la Bat-Mitzvah à l’âge de 12 ans, lors de cérémonies collectives ou individuelles.

Mariage

 Sur le plan religieux, le mariage est un commandement biblique. Il scelle le lien entre deux personnes, leurs familles et la communauté, selon un cadre juridique strictement établi.

   Des rituels à la symbolique élaborée assurent une transition harmonieuse du statut social de célibataire à celui de personne mariée; le réseau institutionnel et familial élargi y est étroitement associé.

Le jeudi précédant la noce

   Les parentes du fiancé ainsi que les Tamzwarat (femmes réputées avoir des pouvoirs sur les forces obscures et les démons) de la famille remettent aux mariés un plateau contenant notamment du Henné, et attachent à leurs mains une amulette (Srira) pour écarter les djnouns.

Le samedi précédant la noce

   Le marié se rend à la synagogue de son futur beau-père où sont lus des Psaumes et des Piyoutim. On jette des dragées comme une pluie de graines pour appeler sur les futurs époux un présage de fécondité. L’après-midi, c’est la présentation du trousseau de la fiancée aux amies et à la famille du fiancé.

   Les amis du fiancé (Islan Zara ou Bahourim) et le fiancé sont invités au repas préparé par ses futurs beaux-parents au domicile de ces derniers.

Le samedi soir

Ce soir-là a lieu la cérémonie de l’Azmomeg, (terme berbère qui signifie attacher) spécifique aux Juifs marocains. Elle consiste à casser un Ïuf frais sur la tête de la future mariée et à y ajouter du henné. Les cheveux sont ensuite enveloppés dans un tissu jusqu’au mardi suivant.
Dans certaines familles on célèbre la cérémonie dite de la belle main (Lil El Mtal). Les femmes mariées passent au bras de la fiancée, sept bracelets et sept bagues à ses doigts.

Le dimanche précédant la noce

On décore les maisons des familles des mariés avec des khamsa et d’autres figures géométriques. On présente des offrandes et des cadeaux (ghrama) qui seront retournés lors d’ occasions similaires.

Le lundi précédant le mariage

Ce jour-là a lieu la rédaction de la Ketouba, en présence d’un rabbin. La cérémonie du mouchoir accompagne le serment du mari qui s’engage à respecter ses obligations maritales. C’est aussi le jour de la construction du Talamon, le trône orné où le jeune couple recevra la bénédiction nuptiale.

Dans certaines communautés, on procède aussi au sacrifice d’une vache, vêtue comme une femme et parée de bijoux, sous les applaudissements et les Zgharit (youyous) des invités.

Cérémonie du Henné à Créteil Paris 1991 - (Photo CCJM)
Cérémonie du Henné à Créteil Paris 1991 - (Photo CCJM)

Hennah ou jour du henné

Il a lieu le mardi soir précédant la noce. La fiancée est installée sur le Talamon avec son fiancé; elle est vêtue de la Keswa El-Kbira (grande robe traditionnelle) et le visage couvert de son voile. On place dans sa main ouverte une pièce de monnaie, donnée par le marié, et on trace ensuite des figures au henné; cette opération est refaite pour tous les participants.

Les rituels de Bachellerie, démontrant la virilité du fiancé, ont alors lieu:

Le fiancé tentera d’écraser le pied de la jeune fille ou d’occuper le premier une chaise (Rite de l’Aabane), ou encore simulera le rapt de sa promise en pénétrant chez elle, chevauchant monture et portant poignard, après avoir parcouru le quartier avec ses compagnons.

Le jour de la noce ou des sept bénédictions :

Le mercredi est le jour du mariage. Les cérémonies commencent par la Purification (Tebilah) des conjoints au bain rituel (Mikveh). L’immersion des femmes s’accompagne de rites magiques. Les mariés se prêtent à des pratiques d’embellissement et portent leur costume de mariage.

L’après-midi la sanctification a lieu sous la Houppa ou Dais nuptial. Le rabbin lit la Ketouba, bénit le vin (Kiddouch) qu’il fait boire aux mariés.

Après cette cérémonie, le mari se retire ensuite chez ses parents pendant que la mariée est conduite en procession au domicile des siens, accompagnée de danses, de chants et des détonations. Elle en fait sept fois le tour avant d’être reconduite chez son mari. Sa belle-mère lui offre sucre et lait à la porte. Son beau-père la porte dans la maison, pour marquer son entrée dans sa nouvelle demeure. Un grand repas accompagne le mariage. La soirée nuptiale, paradoxalement appelée nuit du repos (La Leil Llrahah) marque le début de la vie maritale.

Le jour suivant la noce

Un drap, maculé du sang de la défloration, qui signale la virginité de l’épouse, est présenté à l’entourage, le plus souvent par la mère de la mariée qui pousse des Zgharit.

A partir de ce moment la femme devient Niddah, et se sépare de son époux pendant sept ou quatorze jours.

Les jeunes époux sont considérés à la merci des Djnouns et ne pourront pas quitter la maison; ils recevront des invités tous les soirs, durant lesquels, les sept bénédictions seront récitées de nouveau.

Le premier samedi après le mariage ou samedi du marié

Le jeune marié est invité à lire la Torah à la synagogue, et va prendre son repas chez ses beaux-parents.

Le premier lundi après le mariage

   Le marié attache sa femme avec une ceinture et lui marche sur le pied. Dans certains cas, ils s’échangent des ceintures à boucles d’or ou d’argent. Ces rites sont destinés à prévenir les problèmes d’infertilité et d’impuissance masculine.

Le marié récite la formule consacrée à son épouse:

Te voilà consacrée à moi par cet anneau, selon la loi de Moïse et d’Israël.

L’officiant récite les sept bénédictions et le marié brise un verre en souvenir de la destruction du Temple de Jérusalem.

Photo de mariage de Mr Marc et Rachel Chriqui au temple Beth El de Casablanca. (Photo G. Sebat)
Photo de mariage de Mr Marc et Rachel Chriqui au temple Beth El de Casablanca. (Photo G. Sebat)

Le mercredi suivant la noce ou jour du poisson

   Le marié, en compagnie de ses amis, se rend d’abord à la synagogue et ensuite au marché où il achète un poisson qui sera préparé par son épouse.

Le samedi suivant la noce

   Samedi du regret, les jeunes gens de l’Islan viennent critiquer l’union de leur ami, alors que le marié défend les vertus de son épouse.

   Enfin le second mercredi suivant la noce ou retour de la mariée, (Tornaboda) celle-ci prend un nouveau bain rituel pour se purifier de la défloration et revient au domicile de son mari. Ce retour est accompagné de festivités et marque la fin du cérémonial du mariage.

Evolution du Mariage

   Les cérémonies du mariage ne se déroulent plus dans les maisons des parents des conjoints, mais le plus souvent dans les synagogues, salles de fêtes ou centres communautaires.

   La plupart des rites d’ordre religieux sont encore en usage aujourd’hui: Préparation et Rédaction de la Ketoubah, Serment du Mouchoir, Rites de Purification par Immersion, Lecture de la Ketoubah, Consécration de la Mariée, Bris du Verre et les Sept Bénédictions.

La très grande majorité des rites magiques a disparu laissant toutefois quelques reliques, que chacun reprend et accommode à son gré ; à l’exception de la Soirée du Henné qui est l’occasion de réaffirmer une identité judéo-marocaine en recréant l’atmosphère musicale, les coutumes vestimentaires et culinaires du pays d’origine.

Les préparatifs du mariage

   Toute une tradition orale recommande des diètes particulières. L’une d’elles suggère aux femmes d’absorber au petit déjeuner, une macération de fenugrec et d’eau ou encore une potion à base de grains de sésame et de lait de chamelle… On peut aussi manger à chaque repas un couscous à la noix de muscade et au gingembre.

   Pour les soins du visage, on applique plusieurs types de masques afin d’adoucir la peau et la rendre plus lisse et plus blanche, à l’argile ou rasoul, l’oeuf, la farine, les clous de girofles et le benjoin, entre autres ingrédients.

    Les soins de beauté, maquillage, épilation, nettoyage des ongles, pose de fards et tatouages font également partie des préparatifs au mariage.

   Pour les hommes, dans certaines régions comme à Amizmiz, le jour de la cérémonie des sept bénédictions, on coiffe le futur marié et on lui rase les poils des aisselles ainsi que ceux du pubis, dans une tente située près du ruisseau. Cette coutume, prohibée par la religion, est répandue chez les Juifs du Souss et de l’Atlas.

    Les parfums sont souvent utilisés. Dans la vallée du Todra, on utilise le Hwat fabriqué avec du Noouar ou poudre de fleurs, du Bhor qui est un produit pour fumigations, du Rehan ou myrte. On fait bouillir le mélange et on laisse décanter pendant quatre à cinq jours.

Le maquillage de la mariée juive marocaine s’effectue avec un fard noir appelé Harqus, à base de noix de coco, qu’on applique avec un pinceau sur les sourcils et sur la paupière inférieure. Les traits se prolongent jusqu’aux tempes. Un trait vertical orne le menton depuis la lèvre inférieure. Le fard est parfois si marqué que l’épouse ressemble alors à une poupée.

   Le tatouage, bien que proscrit par le judaïsme, se retrouve chez les Juifs berbères. Selon la forme géométrique du dessin, le tatouage possède des vertus différentes. Il peut protéger contre le mauvais oeil s’il est circulaire ou rendre le partenaire plus amoureux s’il est linéaire.

Décès

 Entre le jour du décès et sa commémoration à la fin de l’année qui suit, l’espace et le temps de l’endeuillé sont rigoureusement organisés.

   La mort peut être visible à certains signes particuliers, décrits dans les textes mystiques du Zohar. Le croyant se prépare au monde futur (Olam Habba) et à sa rencontre avec le Créateur, par le repentir et en confessant ses péchés oralement ou intérieurement; puis il bénit les membres de sa famille.

   Après des ablutions, il est recouvert de son Talit et écoute la lecture des psaumes, du livre d’Ezéchiel et des textes pénitentiels.

   La Hebra Kadicha (la sainte confrérie en charge des rituels mortuaires) signifiera, à la lecture des signes vitaux, le moment particulier où le Shema Isra‘l, la profession de foi, devra être prononcée.

    Le décès constaté, le fils aîné ferme les yeux et la bouche du défunt. Le corps, devenu impur, est posé nu sur le sol et recouvert d’un drap.

   Les prières pénitentielles sont complétées par le Tsiddouk Hadin, une prière qui indique l’acceptation par la famille de la sentence divine. Les membres de la famille déchirent leurs vêtements (Keriah) en signe de séparation d’avec le défunt.

    Pour ne jamais laisser le mort seul, des veilleurs assurent une garde ininterrompue autour du mort ; une bougie est allumée à proximité de la tête.

   La tradition veut que l’on recouvre d’un voile tous les miroirs de la maison et que l’on jette toutes les eaux contenues dans des récipients. Cette pratique sert à annoncer la mort. Pendant cette période, l’endeuillé se consacre exclusivement aux préparatifs funéraires. Il est dispensé de tout autre précepte ou obligation.

La veillée mortuaire
La veillée mortuaire
La mise en terre
La mise en terre

On procède ensuite à la toilette du corps et à sa purification (La Tahara), avant de le conduire au cimetière (La Levaya). L’enterrement a lieu et on prend ensemble un repas funéraire.

   La Tahara (toilette et purification) : la Hebrat Rokhatsim (congrégation des laveurs ou laveuses, une des confréries du dernier devoir, la Hebra Kadisha) purifie le corps (Tahara) au domicile de la personne décédée, dans une chambre spéciale du cimetière, ou encore à l’hôpital.

   Pour les hommes pieux, il est de coutume de faire subir au cadavre un simulacre des quatre peines capitales (Lapidation, Feu, Egorgement, Etranglement) accompagnées de la récitation de textes mystiques avant de passer à la toilette du corps. Le lavage se fait à l’eau chaude et froide, pendant que l’on récite des bénédictions sur chacune des parties du corps.

   Le cadavre est ensuite placé dans son linceul, habillé de ses vêtements (couvre-tête, pantalon , sous-vêtement, veste, bandeau-turban, le Talit rendu impropre à la prière). Le corps est placé dans un cercueil recouvert d’un drap noir.

   La Levaya (ou levée du corps): les cérémonies de l’enterrement doivent avoir lieu le jour même du décès ou le jour suivant, au plus tard; sauf si le décès intervient un jour de fête ou un samedi, ou en cas d’empêchement majeur du proche parent.

Enterrement à Fès 1930
Enterrement à Fès 1930
Obsèques à Casablanca de Boris Toledano, Cimetière juif de Casablanca.
Obsèques à Casablanca de Boris Toledano, Cimetière juif de Casablanca.
Membres de la "Hevra Kadisha" - Safi 1952
Membres de la "Hevra Kadisha" - Safi 1952

Le Pakid (chef de la hebra) dirige le service funéraire pendant lequel les Psaumes de 90 à 100. Il prononce aussi un Panégyrique (hesped) de la personne décédée ainsi qu’un sermon. D’autres prières sont récitées lors du transport du cercueil. Les participants aux funérailles marchent derrière la bière pendant quelques mètres pour rendre hommage au défunt en récitant le Psaume 91.

Au cimetière, des Psaumes sont de nouveau récités et le corps est placé directement dans la tombe sans cercueil.

   Dans certaines communautés, il est de coutume de mettre de l’or dans le cercueil ou dans la tombe : le passage de la Genèse 25, 6, et aux enfants des concubines d’Abraham, il donna des cadeaux, évoque cette coutume qui sert à écarter les mauvais esprits.

   La tombe recouverte de terre, la famille récite le Tsiddouk Hadin puis la Hachkabah (prière pour le repos de l’âme du défunt) et le Kaddich (un texte en araméen qui évoque le nom divin, l’arrivée du Messie et l’avènement du Royaume divin) .

   Il est de coutume de se laver les mains ou de les frotter dans du sable en signe de purification en sortant du cimetière pour chasser les esprits qui sont attirés par l’impureté des mains.

  Les fils vont au cimetière tant pour le décès de leur père que celui de leur mère, ce que les filles ne peuvent faire. On ne mentionne pas le nom du mort dans les communautés du nord du Maroc, tant que la Chivah (sept jours de deuil suivant le décès) dure, pour lui éviter un jugement sévère dans l’au-delà.

   Le repas funéraire servi à la famille comprend un oeuf dur, symbole de deuil et des olives noires. Une bougie brûle constamment en mémoire de la personne décédée.

   Pendant cette période de deuil, la famille directe ne peut quitter la maison (sauf pour les offices religieux et la visite au cimetière) et ne consomme ni viande ni vin, sauf durant le chabbat, où le deuil est interrompu. Ils ne peuvent porter de chaussures de cuir ou faire leur toilette.

   Les endeuillés restent assis sur des bancs ou des chaises basses. Les hommes ne se rasent pas et n’étudient pas. La préparation de la nourriture est assurée par le reste de la famille, amis et voisins. Les visiteurs ne mangent pas dans la maison des endeuillés pour éviter d’être contaminés par la pollution rituelle (Toum’a).

  Pendant cette période, le Kaddich est récité par les endeuillés lors des offices religieux, à la synagogue ou à la maison. Les fidèles se placent devant les endeuillés et récitent le Tsiddouk Hadin et la Hachkabah.

   La veille du septième jour, les endeuillés veillent toute la nuit (Mishmara). Un panégyrique est de nouveau prononcé et une veillée de lecture suit. Une Séoudah (couronnes, café, poisson, whisky ou eau de vie, fruits secs) est servie aux visiteurs.

   Il est de coutume d’aller le lendemain au cimetière et de prononcer le nom de la personne décédée à partir de l’acrostiche composé des premières lettres des psaumes correspondants et de rajouter d’autres psaumes.

   La Hachkabah est de nouveau récitée et on lave les mains des endeuillés en quittant le cimetière. L’ustensile utilisé est cassé, pour éloigner la mort de la famille.

    Au trentième jour du deuil (Shlochim) puis pour le premier anniversaire du décès (entre sept et onze mois plus tard), des rituels semblables prennent place, accompagnés de la pose de la stèle funéraire et de la distribution d’aumônes.

   Le jour de l’anniversaire du décès (Yarsyat), il est de coutume de jeûner, de réciter une liturgie spéciale accompagnée du Kaddich et de la Hachkabah et d’offrir repas et aumônes. Une bougie ou une veilleuse sont allumées, au cimetière ou à la maison. Les pèlerinages au cimetière ont lieu les jours anniversaires du décès et à Ticha be Av et à la veille d’autres fêtes.

Beaucoup de familles maintiennent la mémoire du défunt en allumant, tous les vendredis soirs, un verre avec une mèche flottant sur de l’huile et de l’eau. La mèche représente l’âme, l’huile l’influence de l’individu, et l’eau, le corps humain disparu. Le verre symbolise la résurrection, car à son image, le corps peut être brisé et réparé.

   De nos jours, on a recours aux établissements de pompes funèbres pour organiser les cérémonies funéraires, tandis que pour respecter les législations en vigueur dans les pays d’immigration, l’usage du cercueil s’est généralisé; en outre, les principaux évènements marquant le deuil ont lieu à la synagogue plutôt qu’au domicile.