Institutions Communautaires – A l’étranger.

Angleterre

Les Juifs marocains en Angleterre

L’Angleterre était présente au Maroc, en particulier à Essaouira au cours du XIXe siècle.

Les Juifs de cette ville qui émigrent s’assimilent rapidement au reste de la communauté Sépharade, notamment d’origine portugaise.

Une immigration plus récente provenant surtout d’Israël, comprend quelques centaines de personnes qui s’installent dans leur grande majorité à Londres.

The Association of Moroccan Jewry in Great-Britain, fondée en 1985 les rassemble. Impliquée dans la création du Rassemblement Mondial du Judaïsme Marocain, elle est aussi affiliée à la Fédération sépharade de Grande-Bretagne.

Reçus par le roi du Maroc lors de sa visite au Royaume-Uni en 1987, ses dirigeants, dont Sydney Assor, membre du Board of Deputies et le grand rabbin Pinhas Tolédano, président du tribunal rabbinique sépharade du Royaume-Uni et du Commonwealth furent invités au Maroc par le souverain en 1988.

Une synagogue a été fondée en 1998 dans la banlieue de Londres par un originaire du Maroc, Jacques Onona.

Rocher de Gibraltar

Les Juifs marocains à Gibraltar

   L’immigration des Juifs marocains à Gibraltar remonte au XVIIIe siècle après qu’un traité eut été conclu entre l’Angleterre et le Maroc permettant aux Juifs marocains de s’installer provisoirement sur le Rocher à des fins commerciales.

   Leurs droits à l’installation permanente sont reconnus en 1749, la communauté étant composée d’environ 600 Juifs.

   Spécialisée dans le commerce, cette colonie attire au XIXe siècle de nombreux Juifs marocains provenant de Tétouan, Tanger et Essaouira, qui viennent rejoindre des Juifs originaires de Grande-Bretagne.

   Si ces derniers sont impliqués dans le commerce international, les Juifs marocains sont actifs dans le commerce de détail et l’artisanat.

   En quête d’un nouveau statut social, ils obtiennent la nationalité anglaise, alors que les barrières existant les deux groupes juifs s’estompent et que les relations avec les autres communautés juives de la Méditerranée se multiplient, ainsi que les pèlerinages aux lieux saints.

   Lorsque Gibraltar obtient son autonomie, l’élite juive est bien placée pour assurer le pouvoir et Sir Joshua Hassan, dont la famille est originaire du Maroc, occupe le poste de premier ministre de 1964 à 1969.

   La communauté regroupe aujourd’hui environ 700 membres, majoritairement originaires du nord du Maroc, avec deux institutions, le Kahal Kadosh Abudaram et le Kahal Kadosh Nefusot Yehoudah Synagogue.

La comunauté juive marocaine d'Argentine reçu par Mme La présidente .

Argentine

Les Juifs marocains en Argentine

L’Argentine, pays d’immigration, abrite l’un des groupes juifs marocains les plus anciens d’Amérique latine.

Des jeunes, épris d’aventures, provenant surtout de Tanger et de Tétouan, mais aussi de Larache, Arzila et Rabat arrivent en grand nombre au cours des années 1885-1900, et jusque dans les années 1920.

Une nouvelle vague, d’environ une centaine de familles majoritairement Tétouanaises, viendra compléter cette population dans les années 1960.

Ces communautés s’installent à Buenos Aires, Santa Fé, San Luis, Rosario et Córdoba.

À Buenos Aires, elle constitue environ 10% de la communauté sépharade totale qui compte 5 000 personnes.

Particulièrement actifs et dynamiques dans les professions libérales, ses membres sont très bien intégrés à la société argentine dont ils connaissent la langue et la culture. Avec les employés et commerçants qui composent le reste de la communauté, ils jouissent d’un bon niveau d’éducation.

Perçus comme des Espagnols plus que comme des Juifs, ils sont enclins à s’assimiler plus rapidement à la société argentine que les membres de la communauté ashkénaze, majoritaire.

Aussi, des efforts sont déployés par les institutions communautaires pour sauvegarder les traditions juives marocaines.

Si à leur arrivée, les premiers arrivants ont eu des contacts avec la Congrecación Israelita de la República Argentina, ils créent dès 1891 leur propre institution, la Congregación Israelita Latina de Buenos Aires ( Congregación Israelita Latina de Buenos Aires).

Elle représente la communauté au sein des institutions juives et non-juives et organise les activités cultuelles.

Les fonctions éducatives sont remplies par un jardin d’enfants et un Talmud Torah; un chœur, un club de femmes, un ouvroir et une association d’aide à Israël s’y ajoutent .) qui constitue encore de nos jours un pilier de la vie communautaire.

À celle-ci s’ajoute une institution indépendante, l’Association de Bienfaisance ( L’Association de Bienfaisance s’occupe, depuis sa fondation en 1987 du cimetière juif. ) et le Club Alianza ( Le Club Alianza, centre social et culturel organise des conférences, des réceptions et la commémoration de fêtes religieuses et nationales.) . Cependant le taux de participation aux activités culturelles ou religieuses reste limité, ce qui reflète le processus d’acculturation élevé.

Tombe de Rabbi Shalom Imanuel Muyal au cimetière Saint Jean-Baptiste de Manaus (Photo AP)

Brésil

Les Juifs marocains au Brésil

L’attrait pour le Brésil, qui détient le monopole du commerce du caoutchouc, s’exerce au cours du XIXe siècle, sur les Juifs marocains qui veulent échapper aux conditions de pauvreté, aux épidémies et à l’insécurité politique.

L’existence d’une ligne maritime régulière entre Tanger et Belém facilite les départs d’une population qui vient surtout de la région du Nord du Maroc (Tétouan, Tanger et parfois Larache), et aussi de Rabat, Salé, Fès, Meknès, Marrakech, Mazagan, Mogador et Agadir.

Attirés par le mirage de l’Eldorado sud-américain, ils tentent leur fortune dans de petites villes amazoniennes (Garupa, Cameta, Macapa, Breves, Itaituba, Santarem etc…), et aussi à Belem et Manaus. Une communauté s’installe également dans la capitale, Rio de Janeiro et, plus récemment, à Sao Paulo .

La crise de l’industrie du caoutchouc entraîne un exode de la majorité de ceux qui sont en Amazonie à se diriger vers les villes où ils s’assimilent.

Si, dans ces diverses communautés, la tradition marocaine demeure importante (avec le maintien de la Hakétia et des habitudes alimentaires), plusieurs de leurs membres se considèrent comme des Juifs d’origine ibérique, compte tenu de leur parcours migratoire depuis l’Expulsion.

On peut aujourd’hui observer un retour aux sources marocaines dans certaines de ces communautés.

Les villes amazoniennes connaissent une période de prospérité relative entre 1940 et 1960, avec le développement de nombreuse firmes qui participent au développement régional, comme à Bélem où l’industrie et le commerce dominent. Mais plusieurs de ces insdustriels quittent la région dans les années 1960 pour Rio de Janeiro où les marchés sont plus favorables.

Plus récemment, des petites et moyennes entreprises commencent à prendre leur essor, dans le domaine pharmaceutique, l’immobilier et le petit commerce. A Manaus, le commerce du caoutchouc et la création d’une zone franche. attirent les Juifs des villes de l’intérieur.

Quatrième génération installée au Brésil, elle s’oriente nettement en faveur des professions libérales (médecins, ingénieurs et avocats), plus mobiles. L’attrait des grandes villes tend à dégarnir les élites locales, un exode qui se poursuit aussi vers les villes américaines.

C’est à travers les institutions communautaires que se transmettent un ensemble de traditions judéo-marocaines.

Au Pará, la communauté de Belém est particulièrement active, et fait de nombreux efforts pour maintenir ses traditions marocaines.

Certains de ses membres distillent encore de la Mahya (eau-de-vie à la marocaine).

Le Centro Israélita do Pará existe depuis 1918. Créé par des descendants des premiers pionniers juifs marocains, il fédère les communautés du Pará, et comprend une école, deux centres d’activités culturelles et sociales (société d’entraide) et deux synagogues, Echel Abraham et Shaar Hachamaïm dont les membres-fondateurs sont les Bentolila, Benatar, Benzékri, Larédo, Seruya, Azoulay.

La communauté de Manaus, en Amazonie est plus éloignée de la tradition que celle de Belém, mais c’est autour de la synagogue que s’organisent des activités culturelles, communautaires et éducatives. Le Comité israélite das Amazonas, fondé en 1929 est l’oeuvre des descendants des premiers immigrés juifs marocains et profite de la prospérité de la ville. La communauté de Rio de Janeiro bénéficie des activités de l’União israelita Chel Gemilout Hassadim, fondée en 1882 et qui poursuit ses activités aujourd’hui.

Parmi les personnalités dont les ancêtres viennent du Maroc, on peut noter les noms de Abraham Ramiro Bentés, un général de l’armée brésilienne, président de la communauté juive marocaine et écrivain, le député M. Ruben Medina, réélu six fois au Congresso Nacional depuis 1967 et président du parti Frente Liberal (PFL), le professeur Méir Benchimol, auteur de l’ouvrage Eretz Amazonia, Os Judeus na Amazonia et professeur à l’Universidad da Amazonias où enseignent de nombreux Brésiliens d’origine marocaine dans les différentes disciplines (médecine, économie, administration, ingienerie, mathématiques, etc.).

Etats-Unis & Canada

Toronto

Entre 8000 et 9000 immigrants d’origine marocaine et provenant dans leur majorité (60%) de l’ancien Protectorat espagnol se sont installés dans la métropole ontarienne à partir des années 1950.

Ils y ont trouvé une communauté originaire d’Europe de l’Est bien enracinée et qui avait fondé et maintenu un grand nombre d’institutions.

L’intégration à la société torontoise s’est réalisée par l’adoption de l’anglais et le développement de réseaux sociaux élargis. Il n’existe pas d’organisations culturelles de langue française ou espagnole. La pratique religieuse tend à augmenter en particulier chez les jeunes qui ont aussi tendance à se marier au sein de leur communauté.

Les Juifs marocains, en majorité de classe moyenne, se retrouvent dans les différentes branches économiques avec une prépondérance dans le secteur des services, des manufactures et des professions libérales.

Certains d’entre eux sont des hommes d’affaire réputés, comme les frères Serruya récemment décorés du Grand Prix de l’Entrepreneur, les frères Mimran, fondateurs du Club Monaca, Jacques Benquessus, fondateur de Print Three et philanthrope qui a financé la construction de l’École Or Haemet.

Parmi les professeurs d’université, citons Albert Bendahan, professeur de langues à l’Université de Toronto, Yvette Benayoun-Szmidt à l’université York. Ralph Benmergui est présentateur d’un programme en anglais à TVO, dirigé par Jacques Bensimon.

Les Juifs marocains à Toronto bénéficient du réseau des organisations ashkénazes sur les plans social et éducatif et ont fondé plusieurs synagogues :

Petah Tikvah Anshe Castilla, fondée en 1958 après de nombreuses difficultés et développée par feu Léon Oziel, cette congrégation a construit sa synagogue en 1974. Le rabbin Amran Essayag en a été le chef spirituel, puis a été remplacé par le rabbin Oziel. Cette congrégation compte environ 300 familles, en majorité hispanophones.

Maghen David Sephardic Congregation a aussi été fondée en 1958 grâce à l’initiative d’un groupe de francophones dirigés par feu Sidney Bendahan.

C’est en 1978 qu’à l’initiative de Maurice Benzacar, une synagogue fut achetée. Sous la direction spirituelle du rabbin Yekhiel Benayon, cette congrégation comprend 150 familles surtout francophones, parmi lesquelles on retrouve aussi des Algériens, Égyptiens, Syriens et Libanais.

Minyan Sepharad fut établie en 1977 lorsqu’un groupe de Marocains célébrèrent Pessah ensemble. Ils décident alors de fonder une congrégation permanente dont l’office est dirigé par Moses Elmaleh. Cette institution compte 120 familles.

Tipheret Israël débuta en 1960 pour répondre aux besoins d’un groupe de jeunes adultes désireux d’aller à la synagogue sans avoir à transgresser les règles du chabbat.

Après avoir institué un office dans le domicile d’un des membres, ils achetèrent en 1978 un terrain où une synagogue fut construite et inaugurée en 1988. Sous la direction spirituelle du rabbin Salomon Assayag, la congrégation compte environ 70 familles.

Bet Yossef Sephardi Congregation, qui compte 30 familles, fut fondée en 1988 par un groupe de Marocains, sous la direction de feu Abraham Édéry. Les offices du chabbat et des fête ainsi que des sessions d’étude ont lieu au Centre communautaire Bernard Betel.

Kollel Bar Yohai fut fondée par le rabbin Shalom Revah. D’abord un lieu d’étude, il est devenu une synagogue qui compte près de 120 familles.

Kol Torah fut fondée en 1996 par une quarantaine de familles. Les offices ont lieu dans un local d’un centre commercial.

L’école Or Haemet, en fonction depuis 20 ans, se trouve installée, depuis 1997, sur une superficie de trois hectares. L’école, affiliée au Board of Jewish Education, à la Fédération juive de Toronto, au National Council of Yeshiva Day Schools Torah U’mesorah, a un programme d’enseignement conforme aux critères du Ministère de l’éducation de l’Ontario.

L’école est fréquentée par 300 élèves et 30 enseignants; son cycle s’étend de la Maternelle à la huitième année. Outre l’école, le complexe comprend une branche du centre éducatif séfarade mondial, dont le siège est à Jérusalem, un centre communautaire, le Sephardi Kehila Center, une bibliothèque, une piscine, un gymnase.

Le centre éducatif publie un journal trimestriel international, Hamerkaz, et regroupe de 400 personnes âgées de 19 à 35 ans.

La synagogue Habir Yaacov, qui regroupe 150 familles, est dotée d’un dôme copié sur celui de la synagogue de Cordoue et son arche sainte ressemble à celle de Tolède.

Une salle des fêtes pour 500 personnes ainsi qu’un Mikveh (bain rituel) complètent cet ensemble.

Depuis 1994, sous la direction du rabbin Amram Assayag, un Rabbinat sépharade de l’Ontario a été créé. Il est en relation avec la quasi totalité des congrégations sépharades de la province, ainsi qu’avec un kollel, un beth Midrash et une hevrah kadicha.

Les groupements de Juifs marocains participent aux activités du Congrès sépharade du Canada, de la Fédération Sépharade canadienne ainsi qu’au Rassemblement Mondial du Judaïsme Marocain.

De nombreuses personnes se sont dévouées à la cause communautaire, pour diriger ses institutions, comme Simon Kesslassi etc.

Le président de la communauté juive marocaine de Toronto

Montréal

C’est dans cette métropole de deux millions d’habitants située sur les bords du fleuve Saint-Laurent que s’épanouit une communauté juive marocaine, forte d’environ 18 000 personnes.

Leur installation commence dans les années 1950 et s’étend à partir des années 1960, surtout après la Guerre des six jours. Originaires des différentes villes du Maroc, les immigrants appartiennent généralement aux classes moyennes éduquées.

Près de la moitié de cette population habite dans le périmètre ouest de la ville et le reste dans les municipalités jouxtant cette zone. Sur le plan matrimonial, la plupart sont mariés, avec un nombre peu élevé d’enfants. C’est une population jeune, au niveau de scolarité élevé et multilingue avec une prédominance du français.

Montréal (L'été Indien)
Montréal (L'hiver)

Les Juifs marocains ont mis en place un ensemble d’organismes communautaires qui se démarquent de l’important réseau des institutions juives anglophones qui voulait au départ intégrer le plus rapidement possible les nouveaux immigrants sans tenir compte de leur identité culturelle et linguistique.
En 1976, la Communauté sépharade du Québec (CSQ) est créée. Ses principaux objectifs sont de préserver et promouvoir la culture sépharade et contribuer à une meilleure intégration des immigrants à la société d’accueil.

Elle comprend des commissions qui œuvrent dans les domaines religieux (maintien des registres d’état civil, visite des malades, Hevra Kadishah ou confrérie du dernier devoir), social (information sur les services sociaux, mise en relation avec les organismes pouvant répondre aux besoins), et dans celui de l’information (diffusion d’un journal, La voix sépharade, et d’une émission radio, Horizons sépharades).

La CSQ fédère en son sein des constituantes régionales et des constituantes de services.

Les constituantes régionales comprennent :

– La Communauté sépharade de Laval, créée en 1972 et dont la synagogue Or sefarad a été inaugurée en 1980.
– La Communauté sépharade de Ville Saint-Laurent, Pétah Tikvah, dont la fondation remonte à 1973 et la synagogue inaugurée en 1983.
– La Communauté sépharade Hekhal Shalom de Ville Saint-Laurent, fondée en 1981.
– La congrégation sépharade Or Hahayim de Côte Saint Luc fondée en 1972 et dont la synagogue a été inaugurée en 1981.
– L’association sépharade de la Banlieue Ouest de Montréal, créée en 1975, a acquis récemment un centre communautaire qui fait aussi office de synagogue.

La famille COHEN, en provenance du Maroc, lors de son immigration au Canada
La famille COHEN, en provenance du Maroc, lors de son immigration au Canada

Les constituantes de service comprennent :

– Le Centre communautaire juif qui offre depuis 20 ans des programmes socioculturels et récréatifs organisés par les départements Enfants, Adolescents, Jeunes adultes, Loisirs, Bel-Âge, Culturel et Cultuel ; il comprend aussi une synagogue et une garderie.
– L’École Maïmonide, créée en 1969, dont les programmes d’enseignement primaire et secondaire du ministère de l’éducation du Québec sont complétés par un programme d’études juives visant à préserver et à renforcer la transmission de l’héritage juif marocain, en particulier sa liturgie.
Trois campus desservent la population étudiante, celui de Ville Saint-Laurent est doté d’un pavillon Mohammed V, dédié au roi du Maroc.
– L’École Sépharade, créée en 1976 est affiliée à l’Alliance Israélite universelle.
– Le Centre Hillel, Créé en 1972, constitue la branche francophone de la Fondation B’nai Brith et reçoit des étudiants francophones du niveau collégial et universitaire. Il publie aussi un journal, Bleu-Blanc, rédigé par des étudiants.

On compte aussi 15 congrégations sépharades qui s’adressent au public juif marocain.

La multiplicité de ces lieux de culte traduit l’importance de la pratique religieuse au sein de cette communauté, qui continue à maintenir vivaces les traditions de son pays d’origine.

Sur le plan culturel et artistique, la plupart des associations juives marocaines organisent des conférences avec des invités locaux ou de passage à Montréal, surtout à l’occasion du Festival Sépharade, ou du Mois du Livre Juif de Montréal.
Durant ces manifestations, la société québécoise a ainsi l’occasion d’apprécier la contribution de la communauté juive marocaine à la vie culturelle montréalaise.
La Chorale Kinor, fondée en 1979, interprète un répertoire de Piyoutim, de chansons judéo-espagnoles, hébraïques et québécoises. Elle a donné plusieurs concerts tant à Montréal qu’à l’étranger souvent accompagnés par des Paytanim réputés.

Kol Zimra, récemment fondé et dirigé par Dinah Sabbah, ethnomusicologue, s’inspire du répertoire juif et de la liturgie marocaine. Dinah Sabbah a aussi publié Neim Zemirot, un recueil de 102 pièces musicales de la tradition sépharade.

Au plan théâtral, plusieurs metteurs en scène, comme Carlo Bengio, Solly Lévy et Serge Ouaknine ont monté des spectacles en judéo-arabe, ou inspirés des évènements contemporains.

Les œuvres picturales des peintres juifs d’origine marocaine comme Maxime Ben Haïm et Hasdaï El Mosnino s’inspirent des couleurs et des paysages marocains, tout en puisant dans les courants contemporains.

Sur le plan cinématographique, des cinéastes comme Pierre Eliahou Lasry et Jacques Bensimon ont réalisé plusieurs films sur la vie canadienne ou les problèmes de la société moderne, mais aussi sur la vie au Maroc. Dans les domaines des sciences humaines ou pures, plusieurs érudits et chercheurs d’origine juive-marocaine contribuent au rayonnement scientifique québécois.
Citons parmi eux Georges Azuelos, Marc Benitah, David Bensoussan, Claude Chriqui, Michel Chrokron, Henri Cohen, David Cohen, Eric Cohen, Yolande Cohen, André Elbaz, Mikhaël Elbaz, Michel Kadoch, Jean-Claude Lasry, David Lévy, Joseph Lévy etc.
En 1990, le Congrès sépharade du Canada a été créé par la Communauté sépharade du Québec en vue de développer des liens avec les communautés du reste du Canada et la représenter sur le plan fédéral et international, en particulier par rapport à Israël.
La CSQ est aussi affiliée à la Fédération Sépharade canadienne et au Rassemblement Mondial du Judaïsme Marocain, fondé à Montréal en 1985.

La chorale des élèves de l'École Maïmonide, sous la direction du Cantor Daniel Lasry, organisée par cette institution ...

Etats-Unis

Les Juifs marocains aux États-Unis

   Des petites communautés juives marocaines se retrouvent aussi aux Etats-Unis.

   L’immigration de Juifs marocains vers les États-Unis est assez ancienne, bien que numériquement faible. On rapporte leur présence à la fin du XVIIIe siècle et le premier Juif élu au Sénat américain est David Lévy-Yuli, sénateur de Floride de 1845 à 1860.

   Dans les années 1940 et 1970, des communautés juives marocaines s’installent dans les grands centres urbains comme New York, Washington et Los Angeles.

   Quelques petites communautés sont regroupées ailleurs comme à Miami.

New York

   La Moroccan Society of America, fondée à New York pendant la Seconde Guerre Mondiale contribue à mettre en place un lobby juif marocain auprès du Congrès Juif Mondial. Cette première institution tombe en désuétude.

   Créée en 1970, la Moroccan Jewish Organisation reprend le projet initial, gère une synagogue et mène des activités culturelles dans le quartier de Queens. Ses membres sont dispersés dans la région métropolitaine de New York et dans l’État du New Jersey. Elle est affiliée à la Fédération Sépharade américaine et fait partie du Rassemblement Mondial du Judaïsme Marocain.

Washington

   Washington compte environ 1 000 Juifs originaires du Maroc. La Congrégation Sépharade Magen David, fondée par des Juifs marocains et ouverte à tous les Sépharades de la région, organise des activités cultuelles et de loisirs.

Los Angeles

   Deux synagogues de la Valley rassemblent les Juifs marocains qui y résident.

La Congrégation Em Habanim, fondée en 1974, est une des premières synagogues bâtie par des Juifs marocains aux États-Unis.

   La Adat Yeshurun Valley Sephardic, crée à la suite de dissensions entre membres d’Em Habanim, se qualifie d’orthodoxe et s’intéresse particulièrement à la sauvegarde du culte. Les deux congrégations organisent des événements comme la Mimouna et la Hiloula.

   Parmi les personnalités juives d’origine marocaine, il convient de citer les noms de Liliane Chalom, figure de proue du judaisme marocain, de Simon Serfaty, politologue renommé, des frères Marciano, propriétaires de Guess, des leaders communautaires etc. qui ont chacun à leur manière imprimé une note marocaine au melting-pot-pot américain.

   La représentation de la communauté juive marocaine est minoritaire au sein de la Féderation Sépharade américaine où dominent des Égyptiens et des Syriens.

Em Habanim Sephardic Congregation - Los Angeles
Magen David Sephardic Congregation - Washington

Espagne

Les Juifs marocains en Espagne

L’un des hauts lieux du développement de la civilisation juive, l’Espagne a influencé la pensée, l’architecture et la culture juive marocaine.

Entre l’Édit d’expulsion des Rois Catholiques en 1492 et son abrogation en 1869 dans la nouvelle Constitution espagnole, la présence d’une population juive en Espagne est insignifiante. À partir de 1860, l’occupation du nord du Maroc par l’Espagne implique le maintien de contacts culturels entre Espagnols et Juifs marocains dans les villes de Tanger Tétouan, Ceuta et Melilla, et l’usage du castillan dans ces communautés. La nationalité espagnole, reconnue par le décret de 1924 aux descendants des expulsés sépharades est accordée à des familles juives marocaines.

Si pendant la Seconde guerre mondiale, l’Espagne franquiste, malgré ses liens étroits avec les régimes fascistes, assure la sécurité des juifs vivant dans le zones marocaines sous son contrôle, ce n’est qu’après la guerre que se renouent les fils d’une coexistence entre Juifs et Espagnols rompus depuis plus de quatre siècles.

Les premières migrations ont lieu à partir de 1957 et progressent entre 1967 et 1970. Les Juifs originaires du Maroc représenteraient entre 65% et 85% des 12 000 à 15 000 Juifs vivant en Espagne, soit environ 8 000 à 10 000 personnes.

À part les communautés juives des présides espagnoles, à savoir Melilla, avec ses quelque 1 000 personnes et Ceuta, avec 500, les autres résident à Barcelone (environ 5 000) et à Madrid (environ 3 500) où existaient déjà des petites communautés juives d’origine turque ou achkenaze, ainsi qu’à Malaga (environ 500), Alicante (300), les Canaries (300), Majorque (250), Séville (150) et Valence (100).

L’intégration des Juifs marocains à la société espagnole contemporaine a été rapide et réussie, grâce à leur dynamisme économique et à leur connaissance de la langue espagnole.

Ils occupent des emplois dans le commerce et l’industrie, et sont présents dans les professions libérales.

La Constitution de 1869, en autorisant des pratiques religieuses privées autres que catholiques, ne garantit pas pour autant de statut légal aux autres religions minoritaires.

Les nouvelles lois sur la tolérance religieuse des années 1970 et la nouvelle constitution de 1978 permettent à la Fédération des communautés juives d’Espagne de réaliser une entente avec l’État espagnol au sujet des différentes obligations religieuses, comme le statut des rabbins, les mariages religieux et leur version civile, les cimetières, le respect de la cacherout, du chabbat et des différentes fêtes, les exemptions de taxes et la protection du patrimoine artistique et culturel.

Cette même Fédération a aussi un mandat de représentation dans les autres instances juives mondiales.

Parmi les institutions communautaires, il faut citer la Comunidad Israelita de Barcelona, la Comunidad Israelita de Ceuta et la Comunidad Israelita de Malaga.

La Comunidad Israelita de Madrid regroupe des membres originaires du Maroc à plus de 80%. Dès les années 1960, elle crée un lycée de garçons, puis en 1968 une synagogue et à la fin des années 1970, un collège mixte avec le soutien de l’Alliance Israélite Universelle. Ce dernier offre un enseignement en français et en espagnol, illustrant bien la double culture ou la double identité de bon nombre de Juifs marocains.

Il faut aussi signaler la place importante de la Fédération sépharade d’Espagne au sein de la Fédération sépharade mondiale.

Le rabbin Benito Garzon, l’homme d’affaires Maurice Hatchwell-Tolédano, Jacques Laredo, président de la communauté de Madrid, et Sam Tolédano, entre autres, ont contribué au développement de ces institutions.

À cette occasion, la communauté juive marocaine a reçu le prix de la Concorde du Prince des Asturies, à Oviedo, en signe de réconciliation, tout comme les Tolédano du monde ont effectué un retour symbolique à Tolède, rassemblés par Jacques Tolédano.

Les manuels scolaires ont été révisés à cette occasion afin de mettre en relief le passé juif, ce qui illustre la volonté commune de réhabiliter cette histoire partagée. On constate une diminution des pratiques religieuses et en revanche le maintien de plusieurs coutumes, des habitudes gastronomiques et de langue de même qu’une forte identification à Israël.

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Centre RAMBAM à paris
Centre RAMBAM à paris

France

Les Juifs marocains en France

   La présence d’une communauté juive marocaine en France est antérieure à la Seconde guerre mondiale; elle a connu un fort accroissement dans les années 1950, notamment en 1955-1956, après l’indépendance du Maroc, puis elle a diminué dans les années 1970-1980.

   Aujourd’hui ce sont principalement des étudiants qui partent pour la France. Ces immigrants, formés aux écoles de l’Alliance Israélite Universelle et complètement francisés choisissent la France comme pays d’accueil, et s’y intègrent relativement bien.

   On évalue entre 30.000 et 40.000 le nombre de Juifs-marocains vivant en France, la moitié dans la région parisienne et le reste à Marseille, Lyon, Toulouse, Nice et Strasbourg.

    Cette population jeune, dont la très grande majorité est mariée, se caractérise par un fort taux d’endogamie. Le taux de natalité est plus élevé que celui des Juifs d’origine européenne.

   Leur niveau d’instruction moyen est très élevé. Selon les données rassemblées par Doris Bensimon et S. Della Pergolla en 1989, 24% des hommes et 50% des femmes ont terminé leur cycle primaire, 24% des hommes et 8% des femmes ont terminé le secondaire et 23% des hommes et 17% des femmes ont fait des études supérieures. Ces niveaux sont les plus élevés pour les personnes interrogées de moins de 45 ans.

   Finalement, 18% des jeunes de plus de 15 ans possèdent un diplôme professionnel (CAP, BP, techniciens ou ingénieurs, grandes écoles). On constate une forte présence des membres de cette communauté dans l’enseignement supérieur.

   La pratique religieuse est répandue au sein de cette communauté; elle est moindre chez les jeunes, à l’exception de ceux qui sont sous l’influence du Habbad.

   L’identité juive continue d’être une dimension importante de la définition de soi, mais elle tend quelquefois à occulter son référent marocain.

   Dans la région parisienne, les employés et les cadres moyens sont prépondérants (82% des femmes et 42% des hommes), puis viennent les professions libérales et les cadres supérieurs (29% des hommes et 5% des femmes) qui ont tendance à progresser parmi les moins de 45 ans; 15% des hommes et 11% des femmes sont des commerçants et des artisans.

   Enfin 14% des hommes et 2% des femmes sont des ouvriers ou travaillent dans le secteur des services.

   La communauté juive marocaine comprend plusieurs institutions cultuelles et culturelles dont la grande majorité se trouve à Paris: associations regroupant les originaires d’une même ville comme l’Amicale des anciens de Fès :

L’Amicale des anciens de Fèz
Fondée en 1987, compte aujourd’hui 800 familles membres. Son objectif est d’organiser des voyages à Fès, des fêtes, des événements culturels et de bienfaisance, dont le rassemblement mondial des anciens de Fès qui a eu lieu en 1988 en Israël. Elle diffuse un bulletin d’informations,le Fassi.

L’association des Juifs de Marrakech
  Fondée en 1982, regroupe environ un millier de membres. Son objectif est d’établir des liens de solidarité entre les Juifs originaires de cette ville et de promouvoir la culture judéo-marocaine. À cette fin, elle organise des conférences, voyages, journées d’étude et des fêtes. Elle fait partie de la Fédération sépharade de France et de l’Association mondiale des originaires de Marrakech. Elle diffuse Le trait d’union.

   D’autres institutions ont des objectifs plus généraux comme l’Union des Juifs du Maroc, le Centre Rambam et le Conseil représentatif :

Conseil représentatif
   Proche du centre Rambam, souhaite créer un centre d’étude et de recherche sur le judaïsme marocain, tout en maintenant des relations privilégiées avec Israël. du judaïsme marocain en France. Les activités sionistes sont menées par Siona :


Siona
Créé par des Juifs marocains, est présente dans plusieurs grandes villes françaises et au sein de la Fédération sépharade de France. Elle participe au mouvement sioniste et offre un soutien politique, social et financier à Israël. )

Identité et Dialogue
Le mouvement Identité et Dialogue créé dans les années 70 et regroupant des Juifs marocains en France a été le précurseur de la paix au Proche-Orient. ) a aussi son siège à Paris.

   De nombreux juifs marocains participent à la vie intellectuelle, artistique et scientifique de la France.

   Présents dans les domaines du cinéma et de la télévision, les acteurs Philippe Clair, Richard Anconina, Gad Elmaleh, les metteurs en scène et réalisateur José Benazéraf, Igal Niddam, la cinéaste Izza Génini, la présentatrice vedette de LCI Ruth Elkrief, les journalistes Victor et Salomon Malka, Albert Mallet, Bernard Henri Lévy, les chanteuses Alabina, Frida Boccara et Sapho illustrent cette implication.

   Les professeurs d’université Armand Abecassis, Marcel Benabou, Haim Zafrani, Chantal Benayoun Bordes, Claude Sultan, Jo Tedgui, Benjamin Coriat, Elie Cohen l’économiste et le président de l’Université de Paris Dauphine etc. signalent une importante contribution à l’avancement du savoir, qui se manifeste également dans la médecine par le nombre élevé de grands professeurs, comme Ariel Cohen, Sam Lévy (cardiologues).

   De nombreuses réussites dans le monde des affaires témoignent également de la bonne intégration économique de gens comme Sydney Tolédano (pdg de Christian Dior) David Torjman (vêtement), Albert Ouaniche (ameublement), Albert Cohen (hôtellerie), Maurice Lévy (pdg de Publicis), J. Abergel (pdg de la radio BFM), etc.

   Le monde politique reste plus imperméable aux Juifs marocains, même si quelques uns d’entre eux y ont tout de même fait leur marque, comme Jean Lévy, aujourd’hui diplomate, ouvrant la voie à une nouvelle génération de jeunes diplômés des grandes écoles.

Belgique et Suisse

   Des petites communautés juives marocaines sont actives à Genève et Bruxelles.

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Israël

Les Juifs marocains en Israël

   Une des communautés juives d’origine marocaine les plus dynamiques du monde contemporain vit en Israël.
   La terre sainte et le retour en Israël représentent une aspiration permanente du peuple juif. Refuge durant les périodes d’antisémitisme et de persécutions, les mouvements migratoires vers Israël s’accélèrent au XVIIIe et XIXe siècles.
   Des commerçants et des rabbins émissaires maintiennent des liens entre le Maroc et Eretz-Israël, alors que d’autres immigrants, inspirés par les écrits kabbalistiques établissent des communautés à Safed, Tibériade, Jérusalem, Méron, Hébron, Ramleh.
   Appelés moghrabim (Maghrébins), ils se placent sous la tutelle des Séphardim avant de constituer des groupes indépendants à Jaffa, Haïfa, Acco (Saint Jean-d’Acre), Sidon (aujourd’hui au Liban).
   Dans plusieurs de ces villes, ils contribuent au développement de nouveaux quartiers comme celui de Mahané Israël à Jérusalem, le second à être construit hors des remparts en 1868; ou ceux de Ohel Moshé et Mahané Yossef à Jaffa ou encore dans le Harat El Yéhoud (le quartier des Juifs), qui sera longtemps le centre de Haifa.
   Des figures marquantes sont à signaler comme les rabbins David Benshimon à Jérusalem, Yéhoudah Bibas à Hébron, Yaacov Moshé Tolédano à Tibériade ou encore les familles Moyal, Chelouch et Assouline à Tel Aviv.
   L’essor du sionisme provoque des mouvements migratoires beaucoup plus amples sous la responsabilité des émissaires (Chlichim) de l’Agence Juive.
   Après la Shoah et avec la création de l’État d’Israël, ces migrations deviennent plus systématiques.
   La première phase, légale, se déroule entre 1948 et 1955, et 71 942 immigrants se rendent en Israël.
   La seconde phase, clandestine, se poursuit entre 1955 et 1961. Étaient particulièrement ciblées, les communautés agricoles de l’Atlas et les mellahs de Marrakech, Casablanca et Salé.
   Cette immigration qui a concerné 65 800 personnes n’était pas sans danger, comme le montre le naufrage du Piscès.
 

Nouveaux immigrants du Maroc à Ashdod.

Sous le règne du roi Hassan II, l’immigration est à nouveau autorisée, et entre 1962 et 1963, 72 600 personnes se rendent en Israël, où 210 000 Juifs marocains résident alors.
   Il s’agit d’une des communautés les plus importantes du pays.
   Ces populations sont d’abord installées dans des Maabarot (villages provisoires), graduellement remplacés par des villes de développement dans le Néguev et la Galilée, dans les zones frontalières comme à Achdod, Achkelon, Bet-Chéan, Beer-Sheva, Dimona, Migdal Haemek, Yerouham, Kyriat Chmona, et dans des mochavim (coopératives agricoles); ils sont moins nombreux à Jérusalem, Tel-Aviv et Haïfa.
   L’insertion socio-économique des Juifs marocains en Israël ne s’est pas faite sans difficultés. Les autorités du jeune État sont en effet incapables de réaliser l’intégration de populations si différentes des premiers émigrants d’origine européenne, les fondateurs du pays.
   Leur forte religiosité, leur faible degré d’instruction et leur formation professionnelle inadéquate, rendent ces nouveaux immigrants fortement dépendants de l’aide de l’État. Il s’ensuit des inégalités sociales et économiques qui se traduisent par l’occupation d’ emplois peu qualifiés et temporaires.
   Les Juifs marocains travaillent à la construction des routes, des logements et sont impliqués dans les opérations de reboisement.
   Cette marginalisation s’accompagne de la détérioration du tissu familial et social, d’une certaine délinquance et de diverses formes de discrimination. Qualifiés de Morocco Sakin (Marocains au couteau) ou de Noirs, les Juifs marocains sont victimes de préjugés et du mépris de la part des Juifs d’origine européenne, ce qui affectera durablement les relations intercommunautaires.
   L’identité juive marocaine en est affectée et certains Juifs marocains ont tendance à se faire passer pour des Français, ou à émigrer quand ils en ont la possibilité.
   Une autre réaction sera de contester cette discrimination dans le cadre de mouvements qui, à la fin des années 1950, traduisent leur profond mécontentement.
   Ainsi, des émeutes éclatent dans le quartier défavorisé de Wadi Salib à Haïfa et s’étendent à d’autres villes comme Beer-Sheva, Tibériade et Ashkelon. Le gouvernement tente de réduire les disparités les plus criantes, mais seule la mise en place d’une fondation éducative (O.D.E.D.) visant à aider les étudiants d’origine orientale et nord-africaine au niveau universitaire obtient un certain succès.

Knesset.

Après la Guerre des six jours en 1967, d’autres mouvements de protestation souvent violents s’organisent. L’un des plus connus est celui des Panthères Noires d’Israël, dont les membres fondateurs Charles Bitton et Saadia Marciano, proviennent du quartier défavorisé de Mousrara à Jérusalem.
   À la suite de manifestations réprimées par la police en 1971, des politiques d’apaisement sont proposées par le gouvernement à majorité travailliste sur les plans économique, éducatif, politique et culturel.
   Dans les années 1970 et 1980, les problèmes subsistent même si les disparités ont été légèrement réduites.
   On constate aussi une diminution des taux de natalité parmi ces groupes, sauf chez les plus religieux d’entre eux, tandis que les mariages mixtes augmentent.

Participation politique

   Pendant très longtemps, les grands partis ne comptent quasiment aucun député d’origine marocaine. Le mode de scrutin à la proportionnelle favorise la cooptation dans les stratégies des partis au pouvoir et empêchent l’accès de nouvelles figures au sein des partis politiques.

   La création de partis politiques sépharades dans lesquels des Juifs marocains militent, n’est guère convaincante. La Liste Séphardie obtient quelques sièges au Parlement, lors des deux premières élections nationales, mais disparaît par la suite, faute d’électeurs.

   Si une grande partie de l’électorat juif marocain vote travailliste au cours des premières élections, des tensions se feront bientôt sentir.

   Par exemple, des Juifs marocains participeront, grâce à des leaders du mouvement étudiant ODED, à la création du Mouvement Démocratique dirigé par le général Ygal Yadin qui deviendra Vice-Premier Ministre Israélien; mais ce mouvement finit par disparaître.

 

Meier CHETRIT
Yehuda LANCRY

L’avènement du Likoud correspond à un changement majeur dans la politique israélienne et à une nouvelle implication des Juifs marocains en son sein.

   Leur mécontentement se traduit par le report de leurs voix sur ce parti qui prend le pouvoir en 1977. La nomination de David Lévy au poste de vice-premier ministre témoigne de la place des Juifs marocains sur l’échiquier politique.

Likoud

   Parti politique nationaliste et populiste issu de la fusion du parti Hérout et des libéraux à partir de 1965, sous la conduite de Menahem Begin.

   Les députés d’origine marocaine, Meir Chétrit (porte parole de la coalition) et David Maguen en sont membres.

   En 1981, une rupture entre les dirigeants du Parti National Religieux et son aile sépharade dirigée par Aaron Abouhatseira, aboutit à la naissance d’un nouveau parti, le Tami (Mouvement pour la tradition d’Israël).

   Ce descendant d’une illustre lignée de rabbins mystiques, exaspéré par l’absence de soutien de son parti à la suite d’une accusation de détournement de fonds, décide de fonder ce parti sur une base ethnique, et réussit à faire élire trois députés en 1981.

   Disparu aux élections de 1988, le Tami laisse la place au Shas (Gardiens Sépharades de la Torah), une faction indépendante du Parti religieux Agouda.

   Rassemblant des sépharades, surtout Juifs marocains ( comme Arie Déry) sous la figure emblématique du grand Rabbin Ovadia Joseph, et d’ultra religieux, il fait élire 4 députés aux élections de 1984, 6 députés à celles de 1988 et 1992, et 10 députés en 1996.

Membre de la coalition au pouvoir, ce parti reçoit les ministères de l’intérieur et du travail et du bien-être.

   Le parti travailliste compte aussi quelques députés d’origine marocaine, comme Rafi Edri, qui en fut longtemps le porte-parole, Rafael Ellul, un ambassadeur, Shlomo Benami, ancien ambassadeur d’Israël en Espagne et ministre de l’intérieur dans le gouvernement Barak, Elie Dayan, ancien vice-ministre des Affaires Etrangères, etc.

   Le parti Guesher (Le pont) dirigé par David Lévy, alors vice-premier ministre et ministre des affaires étrangères dans le cabinet élu en 1996, a quitté la coalition au pouvoir pour des raisons liées au blocage du processus de paix et aux politiques économiques trop libérales du gouvernement. Yéhouda Lancry compte parmi ses membres.

   La prise de conscience politique des Juifs marocains s’accroît et ils jouent désormais un rôle dans le jeu des alliances pour le pouvoir. Au sein de la Histadrout (le syndicat national, dont un président est d’origine maorocaine, Amin Pérez), des mairies (Maalot, Chélomi, Migdal Haemek, Bet-Chéan, Dimona, Yavneh, Achdod. Loud et Achkelon), ou dans la diplomatie, les Israéliens originaires du Maroc occupent des postes leur permettant d’acquérir une notoriété suffisante pour progresser sur le plan national et influencer les politiques et la prise de décisions.

   Au total, on compte près de 17 membres élus de la Knesset qui sont en 1996 originaires du Maroc, dont trois ministres, près de 60 maires de municipalités et de nombreuses autres personnalités politiques (y compris le président de l’état hébreu Isaac Navon dont la mère est une Souiri).

Institutions communautaires

L’Union des Originaires du Maroc en Israël
L’association Mabat
Le Comité de la communauté nord-africaine de Jérusalem

expriment chacune à leur manière les positions des Juifs originaires du Maroc.

L’Union des Originaires du Maroc en Israël
Fondée en 1968, cette association a pour objectif d’améliorer l’image des Juifs marocains et de diffuser leur patrimoine culturel.
Elle attribue aussi des bourses à des étudiants, organise des activités socioculturelles et publie un bulletin (Habrit). Des sections de cette association se retrouvent dans plusieurs villes. Elle est membre de la Fédération sépharade israélienne.

Association du Mabat
Elle regroupe les Juifs marocains originaires de Tanger, Gibraltar et de l’ancien Protectorat espagnol.

Comité de la communauté nord-africaine de Jérusalem
Il s’agit de l’une des plus anciennes associations nord-africaine d’Israël, qui est active sur les plans politique et culturel. Elle fournit aussi une aide financière et a créé un Centre mondial du judaïsme nord-africain dans le quartier de Mahané Israël inauguré en 1998.

Le musée, décoré dans la plus pure tradition marocaine par des artisans marocains, abrite une salle dédiée au roi Mohamed V. Présidé par Elie Moyal et Haim Cohen, le centre est dirigé par David Soussana.

   Les originaires du Maroc font aussi partie d’associations plus larges de Juifs nords africains et Sépharades, comme l’Union des Israéliens Olim de France, d’Afrique du Nord et des pays francophones.

L’union des Israéliens Olim
Cette association s’efforce d’intégrer les nouveaux immigrants et leur fournit une aide financière. Elle organise des activités culturelles et représente les Francophones auprès des instances gouvernementales.

Le mouvement Beyahad
Fondé en 1979 par Sam Benchetrit, il a pour objectif d’améliorer l’image des Juifs nord-africains et d’en faire connaître le patrimoine. Il organise des activités culturelles et, en collaboration avec la Fédération Sépharade Mondiale, attribue des prix à des artistes, chercheurs ou écrivains dont l’œuvre porte sur les Juifs nord-africains.

   Associé aux institutions juives nord-africaines mondiales, il a contribué à faire de la Mimouna une fête nationale en Israël. Beyahad s’est fortement impliqué dans le transfert des corps des naufragés du Piscès en Israël. Il milite en faveur du rapprochement intercommunautaire et de l’unité du peuple juif.

L’Organisation des militants de la clandestinité sioniste en Afrique du Nord
Elle réunit les émissaires et les militants qui ont travaillé clandestinement au Maghreb et fait connaître les péripéties de l’immigration clandestine.

Israël est aussi le siège de l’Union Mondiale des originaires d’Afrique du Nord.

Fondée en 1972 par Shaoul Bensimhon elle a pour objectifs : le développement du patrimoine nord-africain, l’amélioration des conditions socio-économiques des Juifs nord-africains en Israël, l’amélioration des relations entre les communautés, l’attribution de bourses et la promotion de recherches sur les Juifs d’Afrique du Nord.

Elle a aussi organisé un congrès des hommes d’affaires originaires d’Afrique du Nord. Son rôle s’est partiellement estompé avec la création de la Fédération Sépharade Mondiale et du Rassemblement Mondial des Juifs du Maroc.

Israël est aussi le siège de l’Union Mondiale des originaires d’Afrique du Nord.

Fondée en 1972 par Shaoul Bensimhon elle a pour objectifs : le développement du patrimoine nord-africain, l’amélioration des conditions socioéconomiques des Juifs nord-africains en Israël, l’amélioration des relations entre les communautés, l’attribution de bourses et la promotion de recherches sur les Juifs d’Afrique du Nord.

Elle a aussi organisé un congrès des hommes d’affaires originaires d’Afrique du Nord. Son rôle s’est partiellement estompé avec la création de la Fédération Sépharade Mondiale et du Rassemblement Mondial des Juifs du Maroc.
Plusieurs centres de recherche ou d’étude visent à mieux faire connaître le patrimoine et l’histoire des Juifs nord-africains comme le Centre de recherches sur les Juifs d’Afrique du Nord, Institut Ben Zvi, l’Institut Bné Issakhar.

Centre de recherches sur les Juifs d’Afrique du Nord, Institut Ben Zvi :
Rattaché à l’Université hébraïque de Jérusalem, il a pour objectif d’approfondir les connaissances sur le judaïsme nord-africain.
En collaboration avec l’Institut de recherches méditerranéennes d’Aix-en-Provence, il a organisé plusieurs colloques dans le domaine.

L’institut Bné Issakhar :
Situé à Jérusalem, il vise à faire connaître la pensée des rabbins sépharades et nord-africains en publiant leurs oeuvres et une revue.
Par ailleurs, l’Orient pour la paix, un mouvement pacifiste, organisé par Shlomo Elbaz, milite en faveur de la réconciliation avec les Palestiniens.

Inauguration de la forêt Mohamed V en Israël.
Inauguration de la forêt Mohamed V en Israël.
Shimon Peres célébrant la Mimouna

Les Juifs marocains contribuent à tous les domaines de la vie intellectuelle nationale. En sciences humaines, on note une explosion des études sociologiques, linguistiques, historiques et anthropologiques portant sur les Juifs marocains, en hébreu, en français et en anglais.

De nombreuses recherches sont menées sur le patrimoine liturgique juif marocain et la musique andalouse, ainsi que sur l’histoire par des intellectuels de renom comme Moshé Bar Asher, Michel Abitbol, Joseph Chétrit, etc.

Dans le domaine musical, les artistes d’origine juive marocaine occupent une place importante.

Les compositions de Shlomo Bar et de son groupe tentent une synthèse entre les traditions musicales de l’Orient et de l’Occident et s’inspirent des poésies traditionnelles ou modernes.

Avi Tolédano et Zehavah Ben sont également des vedettes internationales de la chanson.

Dans le domaine littéraire et dramaturgique, Gabriel Bensimhon, Erez Bitton, Ami Bouganim, Uziel Hazan, Itshak Kenan, Yaacov Sobol, Mordecai Soussan, Albert Suissa Yehel Zafrani ont contribué à l’exploration de la sensibilité juive marocaine, en insistant sur les difficultés d’intégration dans la société israélienne.

Dans le domaine pictural, les œuvres de Raphaël Abecassis, Pinhas Gan Cohen, Moshé Gabbay et Gérard Allon figurent au palmarès des oeuvres reconnues internationalement.

Dans le cinéma, on peut noter les contributions de Haïm Shiran, Simone Bitton, Haïm Bouzaglo, Zeev Revah, David Shitrit et Hana Azoulay Hasfari.
La Mimouna, rituel jusque là plutôt familial ou communautaire, est devenu en Israël une fête nationale marquant ainsi la richesse du patrimoine culturel judéo-marocain et sa contribution à la culture israélienne.

Afin de rappeler la mémoire du roi Mohamed V, une forêt a été plantée en son nom.

Venezuela

Les Juifs marocains au Vénézuela

Dès la fin du XIXe siècle, des petits commerçants originaires de la zone espagnole du Maroc, viennent s’installer au Venezuela. Ils se retrouvent dispersés un peu partout dans le pays et connaissent une assimilation rapide, sauf à Caracas.

Dans les années 1950, puis entre 1960 et 1970, de nouveaux arrivants chercheront aussi à bénéficier des conditions de vie offertes par ce pays en pleine croissance économique. Ils y trouvent une communauté très structurée, bien intégrée et dynamique.

Aujourd’hui, ils sont au nombre d’environ 5 000 à 6 000 personnes, en grande partie originaires de Tétouan, dont le noyau le plus dense se retrouve à Caracas, la capitale.

La première vague migratoire pratique essentiellement le commerce, le négoce du café et du cacao, des tissus et des autres ressources naturelles du pays à partir desquelles ils montent des réseaux d’import-export.

Par la suite, le boom pétrolier vénézuélien contribuera à leur prospérité. La participation des Juifs marocains à la vie économique du pays ne se limite pas pour autant au commerce et à l’industrie (industrie textile, du froid, du meuble, etc.).

Ces secteurs ont progressivement perdu leur prédominance au profit des professions libérales et des services et l’on compte aujourd’hui un grand nombre d’universitaires, d’avocats, d’ingénieurs, de banquiers et de spécialistes des nouveaux métiers de la communication.

Les Juifs marocains installés à Caracas créent, en 1907, la Sociédad Benéfica Israélita qui cherche à renforcer les réseaux de solidarité entre nouveaux arrivants et entre immigrants dispersés dans le pays. En 1919, elle se regroupe avec la Sociédad Israélita de Venezuela dans L’Asociación Israélita de Venezuela :

L’Asociación Israélita de Venezuela
Extrêmement dynamique, cette association chapeaute une synagogue, une bibliothèque, une grande salle de conférence, ainsi qu’un vaste centre social, sportif et culturel. Ce dernier, le Club Hebraïca, est au cœur d’activités très variées dans lesquelles se retrouve toute la communauté juive marocaine de Caracas. L’Association est aussi à l’origine d’un espace éducatif proposant un enseignement religieux et profane qui va de la maternelle au secondaire.

qui prendra le relais à partir de 1930.

Toutefois, ses soixante dix membres continueront à se réunir dans des maisons privées pour la célébration des fêtes religieuses jusqu’à la fondation de la Synagogue del Conde, quelques années plus tard.

Cette dernière, dont le nom rappelle son quartier d’origine, sera détruite au milieu des années cinquante lors de grands travaux de rénovation et d’urbanisation de Caracas. La Gran Sinagoga Tiferet Israel lui succédera. Léon Taurel est un de ses mécènes, avec les fils du philanthrope tangérois Aaron Cohen qui ont fondé la Sinagoga Bet Aarón.

En 1980, le Centro de Estudios Sefardíes de Caracas ouvre ses portes.

Il existe une importante vie communautaire au Venezuela qui se manifeste de multiples façons. Ainsi, dès 1922, la première revue juive de Caracas, Macabeo, est créée grâce aux docteurs Aaron Benchetrit et Jacobo Bendahán Chocrón.

La revue Israël prend le relais en 1933, suivie de la plus importante revue, Maguen-Escudo, publiée irrégulièrement depuis les années 1970 par l’Association Israélite du Venezuela et le Centro de Estudios Sefardíes de Caracas. Ces institutions sont aussi à l’origine d’une collection de livres portant sur les communautés du Venezuela et du Maroc, la Biblioteca popular Sefardi.

Sous l’égide de la CAIV (Confederación de Asociaciones Israelitas de Venezuela) créée en 1966, de nombreuses activités culturelles, dont les semaines sépharades, depuis 1982, sont organisées.

Les autres institutions qui se consacrent à l’étude et la diffusion de ce patrimoine sont l’Instituto Cultural Venezolano-Israelí et l’Instituto Superior de Estudios Judaiscos (ISEJ).

Plusieurs Juifs marocains se sont illustrés dans le domaine médical

Le docteur Aarón Benchétrit s’est engagé dans la lutte contre la lèpre et la grippe espagnole; le docteur Jacobo Bendahán Chocrón, contre la tuberculose; le docteur Elías Benarroch Pariente, pionnier dans la lutte contre le paludisme, s’est penché sur les maladies tropicales.

Il faut aussi mentionner les noms du docteur Henrique Benaím Pinto, important chercheur, dont le nom est immortalisé par une grande avenue de Caracas et celui du docteur Baruch Benacerraf, premier prix Nobel de médecine vénézuélien en 1980.

Politique
Citons ici les noms des sénateurs Rafael Serfaty et Elias Benarroch; des ministres, Gustavo Pinto Cohen, ministre de l’Agriculture et de l’Élevage, Paulina Almozny, vice-ministre de l’Information et Alfonso Benzecri, ministre de la Santé et de l’assistance sociale.

Artistique et littéraire
Au plan cinématographique, Margot Benacerraf s’est fait connaître par son documentaire, Araya. Citons aussi les noms de Isaac Chocron, romancier et dramaturge, Moises Garzon Serfaty, en poésie; et ceux des écrivains Abraham Essayag, Jacob Carciente, Jacob Bentata, Leon J. Benoliel, Daniel Bendahan, de la chanteuse Esther Roffé, et du toréro Sananès.

La communauté juive marocaine du Venezuela entretient des liens étroits avec Israël depuis la fin des années 1940, facilités par les contacts entre ces deux pays.

Elle participe aux activités du Comité Venelozano pro Palestina fondé en 1946. Il faut aussi mentionner le Comité Venezolano del Fesela, situé à Caracas, qui est la section vénézuélienne de la Fédération sépharade d’Amérique latine.